Paranoïa Urbaine Gratuite Et Transmissible
C'est la première rencontre accueillie par Claudine Puget dans le grand atelier de Made in Eric. Les invités sont nombreux, et parmi eux Ralph Rumney venu de Manosque en train. Ralph n'est déjà plus en très bonne santé, Victoire et Michael Slakey lui ont réservé une chambre dans un hôtel à proximité. Après le rituel de signature de la nouvelle planche de cartes, le repas s'engage autour d'une grande table dressée en plein milieu de l'atelier. Arrivé au dessert, la santé de Ralph ne lui permet pas de poursuivre la soirée plus longtemps avec nous. Claudine qui connaît bien le quartier propose à Michael de l'accompagner pour reconduire à pied Ralph à son hôtel. Nous sommes dans une rencontre cARTed conviviale et sympathique, toujours attablés mais bientôt prêts à monter un peu le volume de la musique pour danser, quand me vient une pressante envie de pisser. Je me rends aux toilettes, un peu à l'écart dans un couloir, où le brouhaha des conversations est très assourdi. A ma sortie, je suis très surpris de voir beaucoup de monde dans ce couloir, désert il y encore un instant. A l'entrée de l'atelier c'est un peu la bousculade, toutes les lumières sont éteintes et les invités qui sont encore dans la salle sont tous le long des murs, plus personne à table. Par bribes je collecte des informations auprès d'invités visiblement paniqués et je comprends qu'un sniper nous a pris pour cible. Non ! Si, si, il nous tire dessus par la grande baie vitrée ! Plusieurs coups de feu ! Deux coups ! Non, trois coups ! Non...! me dis-je en haussant les épaules intérieurement. Je veux en avoir le coeur net, c'est quand-même ma responsabilité d'organisateur que chaque invité ressorte vivant d'une rencontre cARTed. J'entre dans l'atelier où se trouvent encore les plus téméraires ou les plus curieux, plaqués aux murs ou comme Hervé Leforestier, le plus hardi, se protégeant avec une chaise en bois brandie vers la baie vitrée. Je ne peux y croire. Je m'approche d'Hervé qui m'explique qu'il y a eu trois coups de feu dont un qui a traversé la vitre. Il me montre l'impact. En effet il y a bien un trou dans la vitre. Et quelques miettes de verre au sol. Hervé m'explique que le tireur doit être dans un des bâtiments dont on voit les lumières, assez loin, au-delà de la voie ferrée qui longe l'atelier mais que l'on ne voit pas par cette nuit très noire. Ok, dis-je à Hervé, si c'est bien une balle, elle est obligatoirement dans le mur d'en face. L'atelier n'est éclairé que par la lumière du couloir mais c'est suffisant pour inspecter ce grand mur blanc. Point de balle ! Je commence à douter sérieusement de cette invraissemblable histoire. Je retourne dans le couloir questionner à droite, à gauche. Certains n'ont rien entendu, certains ont entendu, certains ont cru entendre, mais tous sont effrayés. Je descends l'escalier qui va dehors et retrouve Michael dans la cour. Il m'explique qu'au retour de l'hôtel de Ralph ils ont trouvé les grilles d'entrée des ateliers de la ville fermées. Il a alors aidé Claudine à escalader un grand mur un peu plus loin afin qu'elle fasse le tour du bâtiment et puisse nous prévenir de leur situation. A ce moment Claudine revient, nous rejoint et nous dis : "ils sont fous !" Elle nous explique qu'elle a bien fait le tour du bâtiment, qu'elle s'est retrouvée sur le ballast de la voie TGV mais qu'il y avait entre la voie et l'atelier un grand fossé très large et très profond. Elle a donc repensé à son enfance, à la pratique des petits cailloux lancés dans la fenêtre. Les cailloux du ballast d'une voie ferrée ne sont pas vraiment petits mais qu'importe. Elle en a lancé deux qui apparemment n'ont pas atteint leur objectif. Quand elle a eu lancé le troisième un peu plus fort, elle a vu tout le monde quitter la table pour se précipiter contre les murs et les lumières s'éteindre. C'est au moment où Claudine finissait son récit que la police est arrivée, alertée par le portable d'un convive. Ah ! Marseille...